Rapport IPP n°48

Évaluation de la réforme de la taxe d’habitation

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Présentation

La suppression de la taxe d’habitation sur la résidence principale a été mise en place de façon progressive dès 2018. Cette taxe représentait 23,4 milliards de recettes en 2016 pour les collectivités locales, dont 18,7 payés par les ménages contribuables.

La première partie du rapport s’intéresse aux réactions des communes, privées d’une importante source de contrôle de leurs recettes fiscales à terme et au mécanisme de compensation mis en place par l’Etat.

La deuxième partie de ce rapport s’intéresse aux effets de la réforme sur les
loyers et prix de l’immobilier. La question de l’incidence – c’est-à-dire qui bénéficie de cette baisse d’impôt – est un enjeu majeur de toute réforme fiscale. Il s’agit de savoir si le bénéfice de cette baisse de la fiscalité a pu être capté par les propriétaires de biens immobiliers, à travers les prix de vente de leurs biens, ou à travers les loyers qu’ils perçoivent de leurs locataires.

La troisième partie de ce rapport s’intéresse, à l’échelle individuelle, aux comportements de mobilité résidentielle pour savoir si la suppression de la taxe d’habitation, en rendant certaines communes plus attractives, a eu pour conséquence des mobilités accrues.

Résultats clés

  • Les auteurs ne détectent pas de modification significative des taux de fiscalité locale depuis l’introduction de la réforme lorsque l’on compare les communes plus ou moins affectées. Ceci s’explique par le gel de certains taux de fiscalité locale.
  • Les résultats principaux montrent que la hausse des prix immobiliers sur la période après la réforme a été plus élevée dans les communes les plus concernées par la fin de la taxe d’habitation. A trois ans, l’effet sur les prix immobiliers d’un point de pourcentage de TH/revenu supplémentaire était de presque 50€ en plus par m2.
  • Les auteurs obtiennent un résultat similaire sur le montant des loyers à celui sur les prix à l’achat, à savoir un effet positif et croissant sur les loyers au m2. En 2020, soit trois ans après le début de la réforme, l’effet d’un point de pourcentage de TH/revenus sur les loyers mensuels était de 0,2€ par m2.
  • Les estimations réalisées ne permettent pas de conclure à un effet clair de la réforme sur la mobilité résidentielle.

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Auteurs

  • Laurent Bach
  • Antoine Bozio
  • Paul Dutronc-Postel
  • Étienne Fize
  • Arthur Guillouzouic
  • Clément Malgouyres

 

Méthode

Les méthodes mobilisées pour ce rapport sont multiples car s’adaptent aux différentes questions de recherche et à la nature des données. Pour les questions de fiscalité locale et d’effets sur les prix immobiliers et les loyers, le rapport utilise des données de panel de communes françaises. A l’aide d’un estimateur à doubles effets-fixes, le rapport regarde la corrélation entre le niveau d’exposition à la réforme de chaque commune et les variables d’intérêt.
Pour la dernière partie sur la mobilité résidentielle, les méthodes utilisées s’apparentent plus à des différences-en-différences et à des régressions en discontinuité. Les données au niveau individuel permettent effectivement d’utiliser les seuils d’exonération de la taxe d’habitation.

Données

Fiscalité locale
Les sources de données utilisées dans ce rapport sont les fichiers de recensement des éléments d’imposition à la fiscalité directe locale (REI) de 2012 à 2022. Ce fichier produit par la Direction générale des Finances publiques (DGFiP) recense les données de fiscalité locale pour les principaux impôts locaux directs et
sur différents niveaux (commune, syndicats et assimilés, intercommunalité, département, région).
Pour les recettes totales des communes, les auteurs utilisent la source des comptes consolidés des communes issus de la DGFiP et traités par l’OFGL (Observatoire des finances et de la gestion publique locale).

Pour les prix immobiliers
La source est la base de Demandes de Valeurs Foncières (DVF). Les auteurs utilisent la version d’Etalab qui a procédé à un travail de normalisation des codes, de géolocalisation et surtout de la création d’un identifiant de mutation. La base de données est au niveau des biens immobiliers (donc potentiellement plusieurs biens par transaction) mais certaines variables comme la valeur de la mutation sont au niveau de la mutation.

Pour les loyers
Les données mobilisées pour cette analyse sont des données issues du travail de Chapelle et Eyméoud (2022). Ces données ont été collectées sur des sites internet d’annonces immobilières (SeLoger.com et leboncoin.fr). Elles correspondent donc aux nouvelles offres de loyers, et non au stock actuel des loyers en France. Cette source de données se concentre également uniquement sur le parc locatif privé. L’avantage de ces données (au-delà d’être les seules à exister sur une si grande partie de la France et avec un recul temporel important) est que, se concentrant sur les nouvelles offres, elles représentent la partie des loyers la plus réactive du marché. Cependant, le défaut est qu’elles ne sont pas représentatives des loyers des français en général, seulement des nouveaux loyers. Enfin, ces données portent sur les loyers proposés qui ne sont pas forcément les loyers effectivement contractualisés.

Mobilité
Les auteurs mobilisent trois sources de données.
La première base de données est l’enquête revenus fiscaux et sociaux (ERFS) de l’Insee. L’ERFS contient à la fois des éléments d’enquête et de sources fiscales sur les revenus et impôts payés par le ménage. Ainsi, cette source a l’avantage d’inclure le revenu fiscal de référence (RFR) des ménages ainsi que la taxe d’habitation effectivement payée par le foyer fiscal. Ces informations permettent ainsi d’observer effectivement la discontinuité sur les revenus pour la réforme de la taxe d’habitation.
La seconde base de données utilisée est l’enquête sur les statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV). Cette source comporte également des éléments d’enquête et des données fiscales.
La dernière source de données est Fidéli (FIchiers DÉmographiques sur les Logements et les Individus). Produit par l’Insee, Fidéli est une base d’origine fiscale, à représentation exhaustive de la population française. Fidéli est issue des fichiers de déclaration d’imposition sur le revenu, des fichiers de la taxe d’habitation, des fichiers fonciers, et de la base de données Filosofi (qui renseigne des données relatives au revenu disponible à l’échelle du ménage fiscal). Cette base comprend des informations sur les logements (caractéristiques physiques comme le nombre de pièces, la surface, les équipements ; géolocalisation ; valeur locative cadastrale utilisée pour les impôts locaux, etc.) et les individus qui les occupent (caractéristiques sociodémographiques, revenus fiscaux).
Fidéli est apparié avec la base de données Félin (Fichier échantillonné de l’impôt sur le revenu). La technique d’appariement mobilisée ici est utilisée par l’outil de microsimulation statique TAXIPP, développé au sein des équipes de l’IPP.

Partenaires

Ce projet a bénéficié du soutien du Conseil des prélèvements obligatoires.

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