Rapport IPP n°46 - Octobre 2023

Le plafonnement de l’impôt sur la fortune

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Citer
Bach et al., Le plafonnement de l’impôt sur la fortune. Rapport IPP n°46. Octobre 2023

Présentation

Depuis la création de l’impôt sur les grandes fortunes (IGF) en 1982, l’imposition du patrimoine a toujours été assortie d’un mécanisme de plafonnement. Celui-ci visait à limiter le montant d’impôt payé lorsque la somme des impositions sur le revenu et le patrimoine dont les ménages étaient redevables dépassait une certaine part de leur revenu. Ce rapport vise à mieux comprendre qui étaient les ménages plafonnés, quels étaient leur niveau et leur composition de patrimoine et de revenus. Il propose une description approfondie de ces ménages, et étudie leurs réactions à deux réformes du plafonnement : son annulation ponctuelle en 2012, et la forte variation de son application avec la transformation de l’ISF en IFI.

Résultats clés

Les caractéristiques des ménages plafonnés

  • Par construction, les ménages plafonnés ont de hauts patrimoines et de bas revenus par rapport au reste de la population des ménages qui paient l’ISF, néanmoins leurs caractéristiques sont par ailleurs très similaires, à ceci près que les ménages plafonnés disposent de patrimoines plus importants que la
    moyenne des redevables à l’ISF.
  • Alors que le mécanisme du plafonnement avait pour but de soulager les contribuables au patrimoine illiquide, il s’avère que les patrimoines des plafonnés sont légèrement plus liquides que ceux des non-plafonnés, et ce y compris conditionnellement à un niveau de patrimoine donné. En particulier, les ménages plafonnés disposent de quantités très importantes d’assurance-vie. En outre, les entrepreneurs ne sont ni plus ni moins représentés dans la population des ménages plafonnés.
  • Une conséquence est que le niveau de couverture par du patrimoine liquide
    de l’ISF à payer avant application du plafonnement est très élevé et similaire
    entre plafonnés et non-plafonnés.

Les conséquences pour les ménages de la suppression du plafonnement pour l’année 2012

  • En 2012, à la suite de l’arrivée du président Hollande, une contribution exceptionnelle sur la fortune (CEF) est mise en place pour laquelle aucun mécanisme de plafonnement n’est prévu. L’absence de plafonnement conduit à un doublement de l’ISF à payer pour ceux qui auraient autrement été plafonnés.
  • Les auteurs comparent les ménages qui auraient dû être plafonnés en 2012 compte tenu de leurs revenus des années précédentes (groupe « traité ») avec les ménages qui n’auraient de toute façon pas été plafonnés (groupe « contrôle »).
  • Les auteurs n’observent pas que les ménages qui ont fait face à une très forte charge d’impôt indépendamment de leurs revenus reportés les années précédant 2012 ont cherché à générer plus de revenu disponible en 2012 pour payer l’ISF. Ceci est confirmé y compris parmi les ménages dont la charge d’ISF représentait plus de deux fois le revenu des années précédentes.

Les conséquences pour les ménages auparavant plafonnés de la conversion de l’ISF en IFI

  • En 2017, l’ISF est converti en IFI et, pour la très grande majorité des ménages auparavant plafonnés, l’allègement de la base taxable à l’ISF a pour conséquence de rendre moins saillant le plafonnement pour les ménages.
  • Les auteurs comparent les ménages qui auraient dû être plafonnés après 2017 en l’absence d’IFI compte tenu de leurs revenus et patrimoines des années précédentes (groupe « traité ») avec les ménages qui n’auraient probablement pas été plafonnés (groupe « contrôle »).
  • Les auteurs estiment que la suppression du plafonnement a eu pour conséquence de plus que doubler le RFR reporté par les ménages traités après 2017. Cette hausse se voit particulièrement pour des catégories de revenus faciles à arbitrer telles que les sorties de véhicules d’épargne (assurance-vie notamment), les dividendes, et les plus-values mobilières.
  • Ce très fort effet causal du plafonnement sur le RFR que les auteurs estiment suggère que le coût budgétaire de cette mesure est en réalité deux fois plus important que le coût statique de 1,1 milliards d’euros jusque-là mis en exergue. Il implique aussi que la suppression du plafonnement pour la grande majorité des contribuables a engendré par elle-même des recettes supplémentaires de PFU et de CEHR de l’ordre de plusieurs centaines de millions d’euros.

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Auteurs

  • Laurent BACH
  • Antoine BOZIO
  • Arthur GUILLOUZOUIC
  • Clément MALGOUYRES

Méthode et données

Cette étude se distingue par la mobilisation de données administratives exhaustives d’imposition sur la fortune et sur le revenu, rendues accessibles depuis peu aux chercheurs grâce aux équipes de la Direction générale des finances publiques (DGFiP), du Centre d’accès sécurisé aux données (CASD).

Il s’agit en particulier d’une utilisation de l’appariement entre les fichiers d’impôt sur le revenu (dits « POTE”) et les déclarations d’ISF. Cette confrontation permet en particulier d’identifier des ménages non plafonnés mais
partageant de nombreuses caractéristiques avec les plafonnés, ce que les données de déclarations ISF ne permettaient pas de faire à elles seules.

Partenaires

Ce travail a été réalisé dans le cadre du comité d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital, sous l’égide de France Stratégie.