Présentation
Le Crédit d’impôt recherche (CIR) est aujourd’hui le principal dispositif de soutien public à l’investissement en recherche et développement en France. Il permet aux entreprises de déduire certaines dépenses de recherche et développement de l’impôt dû (Impôt sur les sociétés ou le revenu).
Si le revenu fiscal des entreprises bénéficiant du CIR est positif, elles doivent imputer ce crédit d’impôt sur le montant d’impôt sur les sociétés dont elles sont redevables à la fin de l’exercice. En revanche, si les entreprises sont en situation de pertes, elles peuvent obtenir la restitution de leur CIR après clôture de l’exercice. Cette restitution a lieu entre 6 et 12 mois après la clôture de l’exercice, parfois plus, et donc plus d’un an après engagement des dépenses.
Ce délai est long et variable, mais implique qu’une créance sur l’État est active pendant cette durée. Certaines entreprises peuvent donc choisir de mobiliser cet actif et solliciter un organisme prêteur pour renforcer leur trésorerie.
Ce projet vise à documenter l’effet du préfinancement du CIR sur les entreprises innovantes et s’intéresse aux efforts en R&D ainsi qu’aux performances et à la survie des entreprises qui y recourent.
Résultats clés
Les entreprises faisant le choix de faire préfinancer leur CIR, et n’étant en mesure de le faire ni via un acteur public ni via une banque classique présentent des caractéristiques très distinctives : elles appartiennent plus souvent aux secteurs spécialisés dans la R&D et l’informatique, sont majoritairement jeunes, génèrent de faibles chiffres d’affaires mais emploient des effectifs significatifs, notamment d’ingénieurs.
L’étude ne permet pas de dégager de manière évidente et robuste un effet positif du préfinancement de CIR sur la survie et les performances des entreprises y ayant recours.
Nota bene :
Ces résultats doivent bien entendu être pris avec un certain nombre de réserves. D’une part, la sélection des entreprises dans le programme est très forte, et se fait précisément sur la base d’une santé financière fragile, ce qui rend délicate l’interprétation des évolutions suite au recours. En effet, malgré les efforts pour trouver un groupe d’entreprises comparables, il est tout à fait possible que des différences dans la fragilité financière et la probabilité de faillite demeurent entre les groupes, et empêchent de mettre en évidence un potentiel effet positif du programme. Malgré cette sélection d’entreprises plus fragiles que les autres financièrement dans le programme, on observe une probabilité de faillite après l’entrée dans le dispositif qui est comparable à celle observée dans le groupe de contrôle, ainsi que certaines évolutions positives, comme la hausse des brevets enregistrés au bilan des entreprises traitées.
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Auteurs
- Laurent Bach, professeur associé de finance à l’ESSEC Business School et co-responsable du pôle entreprises de l’IPP
- Étienne Fize, économiste senior à l’IPP
- Arthur Guillouzouic, chargé de recherche CNRS à Aix-Marseille School of Economics et co-responsable du pôle entreprises de l’IPP
- Clément Malgouyres, chargé de recherches CNRS au CREST et économiste senior à l’IPP
Méthode et données
Pour construire les groupes de traitement et de contrôle, les auteurs ont mené une différence-de-différences empilée, à laquelle ils ont associé une phase d’appariement par score de propension.
La méthode de régression empilée (Cengiz et al., 2019) consiste à empiler les observations pour aboutir à la création d’une nouvelle temporalité : la distance au traitement. En effet, à l’inverse de réformes qui toucheraient toutes les entreprises traitées en même temps (l’année de la réforme), dans la situation présente, les entreprises entrent dans le traitement de façon échelonnée dans le temps.
Données mobilisées
Cette étude repose sur plusieurs sources de données administratives au niveau entreprise, qui sont appariées via l’identifiant Siren des unités légales étudiées.
Données sur le préfinancement du CIR. Afin de caractériser le recours au préfinancement du CIR, nous utilisons les données fournies par l’organisme de financement Neftys.
Données sur le Crédit Impôt Recherche (MVC-CIR). Les données MVC-CIR (DGFiP) correspondent aux mouvements de créances entre l’État et les entreprises bénéficiant du CIR, pour chaque millésime de CIR.
Liasses fiscales (BIC-IS). Afin de reconstruire l’ensemble des variables de comptabilité pertinentes pour les entreprises ayant recours au préfinancement de CIR, tant pour leur associer un groupe de contrôle que pour mesurer leur évolution sur des dimensions pertinentes, nous avons recours aux liasses fiscales détaillées issues de la source BIC-IS (DGFiP).
Données d’emploi (DADS Postes et MMO). Afin de caractériser l’emploi des entreprises considérées, et particulièrement l’emploi en recherche-développement, nous utilisons les données DADS Postes (Insee), contenant l’ensemble des emplois salariés une année donnée, au niveau salarié – établissement.
En outre, afin de caractériser la mobilité de la main d’oeuvre autour du recours à un préfinancement de CIR, nous utilisons les données Mouvements de Main d’oeuvre (MMO-Dares), qui permettent de reconstruire les flux de salariés entrants et sortants dans une entreprise à la fréquence mensuelle
Partenaire
Cette étude a été financée par Neftys, un acteur économique privé du secteur bancaire spécialisé dans le préfinancement du CIR et le soutien aux entreprises innovantes.