Rapport IPP n°55

Réforme du salaire journalier de référence et trajectoires professionnelles

Présentation

La réforme du salaire journalier de référence est entrée en vigueur le 1er octobre 2021 dans le cadre d’une refonte globale de l’Assurance chômage en France. Pour les demandeurs d’emploi ayant alterné périodes travaillées et de non-travaillées avant d’accéder à une indemnisation, cette réforme allonge la durée maximale des allocations chômage tout en en réduisant le montant.

Cette étude évalue l’impact de cette réforme sur les trajectoires professionnelles, en tenant compte de l’exposition hétérogène des individus à la réforme. Celle-ci dépend directement du temps passé sans emploi entre le premier et le dernier jour travaillé au cours des deux dernières années.

Résultats clés

Les résultats indiquent une diminution des allocations chômage et une augmentation de la durée potentielle d’indemnisation pour les individus aux parcours les plus fragmentés. Ces changements s’accompagnent d’une baisse du recours à l’indemnisation et d’une hausse de l’emploi dans les six mois suivant la perte d’activité. Les effets se manifestent principalement entre janvier et juin 2022, la méthode utilisée ne permettant pas de conclure quant à l’existence d’effets de plus long terme.

  • Une baisse des allocations mais un allongement des durées : la réforme baisse l’allocation journalière de 0 à 10% tout en étendant la durée potentielle d’indemnisation jusqu’à 75% selon les profils.
  • Une augmentation de l’emploi et baisse du recours : on observe une augmentation du nombre de jours travaillés (+5 à +20%) pour les individus aux parcours les plus fragmentés, avec une élasticité
    emploi-allocation de -0,5 à -0,9%. En outre, on observe une baisse du recours à l’assurance chômage
    d’environ 2 points.
  • Un impact plus important pour les personnes les plus exposées : l’impact augmente selon la part des périodes inter-contrats dans la période de référence, avec des effets concentrés sur les groupes ayant plus de 50% d’inter-contrats.
  • Absence d’effet détectés sur la stabilité professionnelle : malgré l’objectif d’encourager des trajectoires plus continues, aucun impact détecté sur la nature des contrats obtenus (CDD, CDI), leur durée, les salaires ou les transitions professionnelles.
  • Une baisse des revenus au chômage sans report sur les minima sociaux : la réforme n’a pas entraîné de report significatif vers le RSA, limitant ainsi son impact aux seules dépenses d’assurance chômage.
  • Par ailleurs, pour les bénéficiaires de l’assurance chômage, la diminution des allocations, combinée à une reprise d’emploi plus rapide, se traduit par une réduction des indemnités versées pouvant atteindre 1 000 euros sur une période de six mois.

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Auteurs

  • François Fontaine
  • Pierre Rousseaux
  • Maxime Tô

Méthode et données

Les auteurs estiment les effets causaux de la réforme sur les trajectoires d’emploi par une méthode de différence de différences, sur des données administratives retraçant les parcours d’emploi, de chômage et de non emploi (panel MiDAS de la Dares).

Leur niveau d’observation est la fin de contrat. À chaque fin de contrat est associée une série d’indicateurs relatifs à la trajectoire de l’individu suite à cette fin de contrat : recours à l’assurance chômage, montant éventuel des allocations, nombre de jours travaillés de la personne au cours des 6 et 12 mois suivant sa fin de contrat, type d’emplois repris, nombre de contrats repris, nombre de jours par contrat etc. Les auteurs comparent l’évolution de ces indicateurs en fonction de la date de fin de contrat, entre différents groupes définis selon la durée d’inter-contrats sur la période servant au calcul du SJR.

Pour prendre un exemple, on compare le nombre de jours travaillés pour les fins de contrat avant et après le 1er octobre 2021. On conclut à un effet positif de la réforme sur l’emploi si l’augmentation est plus importante (ou si la baisse est moins forte) pour les individus ayant d’importantes durées d’inter-contrats, par rapport à ceux qui en ont peu. On corrige ainsi des évolutions générales du marché du travail, avant et après la réforme, et des différences systématiques entre groupes d’inter-contrats, tout en utilisant les différences d’exposition à la réforme pour en mesurer les effets.

Cette méthode suppose néanmoins que les effets de saisonnalité sur le marché du travail soient similaires entre les différents groupes de durées inter-contrats. Nos résultats suggèrent la plausibilité de cette hypothèse à condition que l’on compare entre ces groupes des indicateurs relatifs à l’emploi cumulé sur une durée d’au moins 6 mois suivant la fin de contrat.

Soutien

logo Dares

Ce travail a été mené dans le cadre des travaux du Comité d’évaluation de la réforme de l’Assurance chômage initiée en 2019, et a bénéficié d’un financement de la Direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares) dans le cadre de l’appel à projets de recherche « Suivi quantitatif des effets de la réforme de l’assurance chômage pour les demandeurs d’emploi ».