Note IPP n°117

Rupture conventionnelle et licenciement: conflit ou coopération?

Présentation

Introduite en 2008, la rupture conventionnelle individuelle visait à faciliter la procédure de fin de CDI et encourager les séparations à l’amiable, en favorisant la négociation directe entre employeur et employé. Le processus est en effet moins coûteux et plus simple que celui d’un licenciement pour motif personnel, ce dernier nécessitant une cause réelle et sérieuse et donnant lieu à un contentieux dans 25 % des cas. La rupture conventionnelle permet de terminer un emploi d’un commun accord, préserve l’éligibilité à l’assurance chômage et rend possible la négociation (sur l’indemnité et la date de départ). Cette note résume les résultats de Carry et Schoefer (2024), qui évaluent la part de licenciements ayant été remplacés par des ruptures conventionnelles et identifient les facteurs pouvant prévenir le recours aux ruptures conventionnelles.

A partir de données administratives et d’enquête, les auteurs trouvent que seulement 12 % des licenciements pour motif personnel se terminent par une rupture conventionnelle (soit 24 % des ruptures conventionnelles). Ces licenciements convertis ne sont pas ceux qui auraient donné lieu à un contentieux devant le conseil des prud’hommes. Il s’agit de licenciements qui étaient déjà plus amiables, comme ceux trois ans avant l’âge de départ à la retraite. Une nouvelle enquête auprès de directeurs des ressources humaines met en lumière l’importance des relations conflictuelles entre employeurs et employés comme barrière au recours à la rupture conventionnelle pendant un licenciement. Trois facteurs principaux émergent : des relations de travail hostiles, le recours au licenciement comme outil disciplinaire afin de décourager certains comportements, et les divergences de point de vue sur l’issue d’un contentieux. Enfin, si peu de ruptures conventionnelles se substituent à des licenciements, les estimations indiquent que la majorité remplace des démissions ou des poursuites d’emploi.

Résultats clés

  • Seulement 12 % des licenciements pour motif personnel ont été remplacés par des ruptures conventionnelles (soit 24 % de l’ensemble des ruptures conventionnelles).
  • Les licenciements remplacés par des ruptures conventionnelles ne sont pas ceux qui donnent lieu à des contentieux, mais ceux déjà à l’amiable.
  • Les relations conflictuelles entre employeurs et employés empêchent la majorité des licenciements de se terminer par une rupture conventionnelle.
  • Trois mécanismes expliquent principalement cette situation : l’hostilité entre employeur et employé, l’utilisation du licenciement comme outil disciplinaire vis-à-vis des autres employés, et les divergences de point de vue sur l’issue probable aux prud’hommes.
  • La majorité des ruptures conventionnelles remplace des démissions ou des poursuites d’emploi, ce qui ouvre de nouveaux droits aux allocations chômage.
  • Les employeurs accordent des ruptures conventionnelles en remplacement de démissions
    notamment parce que l’employé facilite en retour la transition avant son départ.

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Auteurs

  • Pauline Carry est professeure à l’université de Princeton
  • Adrien Mangold est assistant de recherche à l’université de Princeton
  • Benjamin Schoefer est professeur à l’université de Berkeley