Pauline Charousset et Julien Grenet publient deux nouvelles notes IPP sur la réforme d’Affelnet-lycée à Paris.
À l’heure où le ministère de l’Éducation nationale réfléchit aux leviers qui pourraient être mobilisés pour faire progresser la mixité sociale et scolaire au collège et au lycée, la réforme de la procédure Affelnet-lycée à Paris offre un exemple concret de mise en œuvre de cet objectif à grande échelle. À la rentrée 2021, cette procédure automatisée d’affectation des élèves aux lycées publics a été réformée en profondeur pour tenter de rééquilibrer la composition sociale et le niveau scolaire moyen des élèves admis dans les lycées de la capitale. Pour atteindre cet objectif tout en garantissant aux élèves de pouvoir être affectés dans un établissement situé à une distance raisonnable de leur domicile, une nouvelle sectorisation des lycées a été mise en place et le barème qui détermine les priorités des élèves a été modifié pour tenir compte de l’indice de position sociale (IPS) de leur collège d’origine.
Jusqu’en 2022, les deux lycées publics les plus prestigieux de la capitale, Henri-IV et Louis-le-Grand, étaient exempts de cette procédure d’affectation automatisée. Au début de l’année 2022, pour apporter plus de transparence au processus d’admission dans ces lycées et accélérer leur ouverture sociale, une nouvelle procédure semi-automatisée a été mise en place pour les élèves parisiens de troisième qui souhaitent intégrer ces établissements à la rentrée suivante.
Les deux notes évaluent l’effet de ces changements de procédures d’affectation sur la composition sociale et scolaire des établissements parisiens ainsi que sur les performances des élèves.
Enseignements clés concernant la réforme Affelnet-lycée à Paris :
- Pour renforcer la mixité sociale et scolaire dans les lycées publics de la capitale, l’académie de Paris a mis en place à la rentrée 2021 une nouvelle sectorisation des lycées et introduit dans la procédure Affelnet un nouveau bonus d’affectation qui tient compte de l’indice de position sociale (IPS) du collège d’origine des élèves.
- En l’espace de deux ans, la réforme a entraîné une diminution de 39 % de la ségrégation sociale entre les lycées généraux et technologiques publics, et une diminution de 30 % de leur ségrégation scolaire par rapport aux niveaux constatés en 2019.
- À court terme, la réforme n’a pas entraîné de « fuite » vers le privé: on ne constate pas de dégradation significative de la composition sociale ou des performances scolaires moyennes des élèves des lycées publics par rapport à ceux du privé.
- Plusieurs freins limitent cependant la capacité d’Affelnet à atteindre pleinement les objectifs qui lui ont été assignés: le caractère insuffisamment mixte du secteur de recrutement de certains lycées, le statut dérogatoire de certaines formations et, surtout, le fait que les lycées privés sous contrat ne soient pas intégrés à la procédure.
Enseignements clés concernant l’intégration des lycées Henri-IV et Louis-le-Grand à la procédure Affelnet :
- Depuis la rentrée 2022, les lycées Henri-IV et Louis-le-Grand ne recrutent plus leurs élèves parisiens de seconde sur dossier. Une nouvelle procédure a été mise en place qui attribue les places en fonction de trois critères : les résultats scolaires de 3ème, le statut de boursier sur critères sociaux et la composition sociale du collège d’origine des candidats.
- À l’issue de la première année de mise en œuvre de cette réforme, la diversité sociale a nettement progressé dans les deux lycées : le taux de boursiers a doublé par rapport à la rentrée 2021 et, parmi les admis parisiens, la part des élèves issus de catégories sociales très favorisées est passée de 84 % à 70 %.
- La nouvelle procédure a également permis de rééquilibrer la répartition géographique des admis parisiens : entre 2021 et 2022, la part des élèves issus de collèges socialement favorisés (indice de position sociale supérieur à 124) est passée de 54 % à 44 %.
- Cette ouverture sociale et géographique ne s’est pas effectuée au prix d’une baisse du niveau scolaire moyen des admis : les performances aux épreuves écrites du brevet des entrants de la rentrée 2022 étaient même légèrement supérieures à celles de la cohorte précédente.