Note IPP n°92

Quels impôts les milliardaires paient-ils ?

note IPP 92

 

> Lire la note (version actualisée au 07.06.2023)

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Présentation

A l’aide de données administratives inédites, reliant les déclarations de revenus des
particuliers aux déclarations fiscales des entreprises en France en 2016, les auteurs mesurent les taux d’imposition directe effectifs des ménages situés au sommet de la distribution des revenus. Cette nouvelle mesure, distincte du traditionnel revenu fiscal de référence en ce qu’elle intègre notamment les revenus non distribués des sociétés détenues par ces ménages, les amène à interroger la réalité de la progressivité de l’impôt.

Enseignements clés

(chiffres actualisés à partir du working paper de septembre 2025)

  • Le taux d’imposition effectif des ménages français apparaît en 2016 progressif jusqu’à des niveaux élevés de revenu. Il atteint 45% pour les foyers appartenant aux 0,1 % les plus riches.
  • Le taux d’imposition effectif devient régressif au sommet de la distribution, passant de 45 % pour les 0,1 % les plus riches, à 25 % pour les 0,0002 % les plus riches.
  • Pour les « milliardaires », l’impôt sur le revenu ou l’ISF ne représentent qu’une fraction négligeable de leurs revenus globaux, alors que l’impôt sur les sociétés est le principal impôt acquitté.
  • Le taux plus faible d’imposition des plus hauts revenus s’explique par le fait que l’imposition des bénéfices des sociétés est plus faible que l’imposition des revenus personnels.

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Erratum: la version de la note publiée le 06.06.2023 contenait une erreur dans le niveau d’entrée et le niveau moyen de revenu du tout dernier groupe de ménages, cette nouvelle version procède à une correction qui n’entame aucun autre chiffre ou graphique mentionné dans l’étude.

Historique du projet

Ce projet de recherche a démarré dans le cadre des travaux d’évaluation des réformes de la fiscalité du capital de 2017. Cette évaluation a nécessité un appariement inédit de données (cf supra) permettant de connaître avec précision, pour l’année 2016 en France, la situation fiscale des entrepreneurs. Les résultats de cette évaluation ont été rendus publics via 3 rapports IPP en 2021 et 2023 (Évaluer les effets de l’impôt sur la fortune et de sa suppression sur le tissu productif, Le plafonnement de l’impôt sur la fortune, Effets sur la création d’entreprises, l’expatriation et la circulation de l’épargne des réformes de la fiscalité du capital) et ont alimenté les propres rapports du comité d’évaluation réuni sous l’égide de France Stratégie (lien).

Cet appariement de données a par la suite permis l’approfondissement de ce sujet à des fins de recherche scientifique par l’IPP. Les chercheurs de l’IPP se sont effet particulièrement intéressés à la composition du revenu des milliardaires, singulière par rapport au reste de la population et par conséquent à leur imposition.

Après plusieurs présentations lors de conférences et séminaires internationaux de recherche en économie, ce travail a donné lieu à la publication d’une version synthétique et pédagogique en juin 2023 sous la forme de la note IPP n°92.

L’équipe de recherche a déposé en 2025 la version académique de ce travail sous forme de working paper (prochainement disponible). Cette version intègre plusieurs approfondissements méthodologiques (croisement avec les véhicules de détention utilisés par les hauts patrimoines Challenges, affinage des taux de détention après mise à jour des données sources, réestimation des revenus et impôts payés à l’étranger, meilleure prise en compte de l’impact des crédits d’impôts, déductions fiscales et reports déficitaires, intégration des revenus capitalisés dans les assurances-vie,…) qui ont consolidé les principaux résultats.

Certaines valeurs sont modifiées par rapport à la note 92 de juin 2023:

  • Le taux d’imposition effectif des ménages français pour les foyers en 2016 appartenant aux 0,1 % les plus riches est de 44,8% (46% dans la note 92)
  • Ce taux est de 25 % pour les 0,0002 % les plus riches (26% dans la note 92)
  • Les valeurs des revenus économiques sont modifiées, à des niveaux plus bas que dans la note 92.

NB : Ce travail se fonde toujours sur les données fiscales de 2016. L’IPP n’a pas accès à des données plus récentes qui permettraient une actualisation des calculs présentés ci-dessus. Ce travail se poursuit actuellement dans le cadre du projet de recherche INTERTAX (Project-ANR-24-CE26-6505) mené avec le soutien de l’Agence nationale de la recherche . Il vise notamment à constituer une base de données détaillée de l’actionnariat des entreprises, évaluer les effets des réformes fiscales sur les comportements et stratégies de ces entreprises.

 

Méthode et données

Cette étude se distingue par la mobilisation de données exceptionnelles, rendues accessibles pour la première fois aux chercheurs grâce à un effort inédit et conjoint des équipes de la Direction générale des finances publiques (DGFiP), du Centre d’accès sécurisé aux données (CASD) et de l’Institut des politiques publiques (IPP). Cette base de données a été mise au point dans le cadre des travaux d’évaluation de la réforme de la fiscalité du capital (Bach et al., 2021).

> Télécharger données sous-jacentes – avec les revenus moyens par fractile de revenu : figure 1afigure 1b
Les données actualisées à la suite du working paper de septembre 2025 seront prochainement téléchargeables.

Construction de la base de données
Le travail a consisté à construire une table d’appariement qui permette de connaître la situation fiscale personnelle pour 2016, au titre de l’ISF-IFI et de l’IR, des actionnaires individuels de référence des entreprises françaises. Les données sont ainsi issues des déclarations individuelles d’impôt sur le revenu (fichiers POTE), des déclarations d’impôt sur la fortune (fichiers ISF-IFI), des formulaires 2033/59 des liasses fiscales de l’impôt sur les sociétés qui indiquent les actionnaires de référence de chaque entreprise (détenant au moins 10 % du capital social), complétés par les données d’actionnariat de la base Orbis et les données sur les représentants légaux du RNCS.

Une procédure stricte de protection des données personnelles
L’appariement a été réalisé après une analyse d’impact relative à la protection des données (Cnil), l’accord du comité du secret statistique pour l’accès aux données et en conformité avec les procédures RGPD. Afin de garantir la protection des données individuelles utilisées, l’appariement a été réalisé par un tiers de confiance (le CASD) ne disposant que des variables identifiantes et remettant à la DGFiP une clé de passage non identifiante des fichiers de source ménage avec les fichiers d’entreprise. Les données finales mises à la disposition des chercheurs sont anonymisées (suppression des identifiants personnels) et sont accessibles uniquement via le CASD afin de garantir le respect du secret statistique. Le fichier apparié est dénommé « Base des actionnaires et dirigeants de sociétés doublement appariée » (BADS2A).

Des données d’une rare qualité
Les données résultant de cet appariement sont exceptionnelles à l’échelle internationale : seuls quelques pays nordiques comme la Norvège et la Suède ont, à ce jour, permis leur construction à des fins de recherche scientifique.