Rapport IPP n°39 - Décembre 2022

Le recours à l’activité partielle pendant la crise sanitaire et ses effets

Rapport IPP n°39 – Décembre 2022
Auteurs : Laurent Bach / Thomas Breda / Paul Dutronc-Postel / Nicolas Ghio / Clément Malgouyres / Léa Toulemon

Résumé :
D’une ampleur inédite, le dispositif de recours à l’activité partielle a été l’un des principaux leviers d’action de la puissance publique pour le soutien aux entreprises et le maintien des salariés dans leur emploi, notamment lors du premier confinement au deuxième trimestre 2020, au plus fort des restrictions sanitaires mises en place pour lutter contre la pandémie de Covid-19. Un quart de l’activité salariée était ainsi en activité partielle et sur l’ensemble de l’année 2020, 55% des établissements y ont recouru pour une partie au moins de leurs salariés.

Ce rapport analyse en 3 parties distinctes les modalités, déterminants et conséquences du recours à l’activité partielle.

Messages clés :

L’activité partielle, un choix par défaut lorsque le télétravail n’est pas possible ?

  • Au-delà d’une dimension sectorielle très forte, ce sont les facteurs favorisant la possibilité
    du télétravail qui expliquent une part très importante du recours (ou du non recours) à l’activité partielle.
  • L’importance de l’outil numérique dans l’activité de l’entreprise, et l’accès à une bonne
    connexion Internet au domicile des salariés, ont des effets négatifs complémentaires et
    très prononcés sur le recours à l’activité partielle pendant le premier confinement.
  • Des effets symétriques sont observés sur le recours au télétravail. Celui-ci semble
    s’autonomiser au moins en partie à l’occasion du deuxième confinement, où les mesures
    sanitaires étaient moins restrictives.
  • Les chocs de demande internationale ont un effet très important et homogène sur la
    période, au contraire des chocs liés aux chaînes d’approvisionnement. Ceux-ci, d’ampleur
    beaucoup plus limitée, semblent ne jouer que pendant l’été 2020.
  • Un recours plus important à l’activité partielle semble avoir un effet négatif sur les nouvelles embauches et sur la croissance du chiffre d’affaires des entreprises dans les mois qui suivent, et ne semble pas associé avec une diminution des faillites. Ce résultat nécessiterait un recul temporel étendu et des données supplémentaires pour être confirmé.

A suivre :
Un arbitrage naissant entre plusieurs politiques publiques se dessine. La couverture du territoire en infrastructures numériques, qui n’est pas exhaustive ou de qualité homogène, et l’intégration du télétravail dans le fonctionnement des entreprises (et notamment dans les accords d’entreprises), étaient donc des politiques publiques indirectes qui pouvaient alléger le recours à l’activité partielle. Est-ce à dire qu’il aurait été moins coûteux d’investir dans les infrastructures numériques que de mettre en place un dispositif d’activité partielle ?

L’analyse du dispositif d’activité partiel s’inscrit au sein d’un programme de recherche plus vaste visant à appréhender les effets du télétravail sur les entreprises et leurs salariés pendant et après la crise sanitaire.

Dans un rapport à paraître sur l’évaluation des effets du déploiement du Plan France Très Haut Débit, nous explorons également d’autres aspects de l’impact des infrastructures numériques sur la résilience au choc de la crise sanitaire, afin d’améliorer la compréhension des coûts et bénéfices associés au déploiement de ces infrastructures.

Consulter le rapport intégral

 


Méthode et données :
Les mesures de recours à l’activité partielle pour les entreprises présentes et actives au 31 décembre 2019 sont élaborées en rapportant le volume d’heures indemnisées au titre de l’activité partielle – mesuré dans les données administratives- à la taille de l’entreprise en 2019 en équivalent temps plein (ETP).
Les résultats sont ensuite corroborés avec des données d’enquête auprès des entreprises puis confrontés à des indices représentant, au niveau de chaque entreprise, l’importance de l’outil numérique dans le travail quotidien des salariés, la disponibilité d’une bonne connexion Internet à leur domicile des salariés, et l’ampleur des chocs internationaux de demande et de chaîne de valeur auxquels elle est confrontée.

Au niveau des individus, les dynamiques de l’emploi et de l’activité partielle tout au long de l’année 2020 sont examinées grâce aux données de l’Enquête Emploi en Continu.

L’effet des caractéristiques familiales des individus sur leur situation et leurs conditions d’emplois, ont été particulièrement analysées, en contrôlant finement pour un ensemble riche d’autres caractéristiques individuelles.

L’identification causale des effets microéconomiques d’un dispositif de politique publique unique dans un contexte macroéconomique aussi mouvementé et un contexte réglementaire aussi complexe que ceux de l’année 2020 impose une grande prudence dans l’élaboration de stratégies empiriques.