Projet

Évaluation de l’Index d’égalité professionnelle

Contexte:

En septembre 2018, le gouvernement français a pris un ensemble de mesures visant à réduire les inégalités femmes-hommes, parmi lesquelles la mise en place de l’Index de l’égalité professionnelle. Depuis 2019, toutes les entreprises privées de plus de 50 salariés doivent calculer cet indicateur et obtenir une valeur minimale à cet Index, à défaut de quoi elles s’exposent à des sanctions.

Cet Index introduit, pour la première fois dans les politiques de lutte contres les inégalités liées au sexe, une obligation de résultat pour les entreprises et non seulement une obligation de moyens. Il regroupe de manière synthétique plusieurs indicateurs portant chacun sur un aspect des inégalités professionnelles femmes-hommes, et calculés à partir de la situation professionnelle des femmes et des hommes salariés dans les entreprises.

Présentation du projet :

Ce projet vise à évaluer l’impact de la mise en place de l’Index de l’égalité professionnelle sur les inégalités entre femmes et hommes dans l’entreprise. Pour ce faire, il s’appuie sur les données déclarées par les entreprises et les données administratives détaillées concernant les rémunérations et heures travaillées par l’ensemble des salariés du secteur privé.

Financeurs :

Cette étude a reçu le soutien financier de l’IRES (Institut de recherches économiques et sociales) et a été réalisée dans le cadre de l’Agence d’objectifs. Elle a été produite dans le cadre d’une convention entre la CFDT, l’Ined et l’IPP.

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Enseignements clés :

1. La couverture de l’Index est très imparfaite

Seulement 50 % des entreprises (44 % des PME-PMI et 93 % des entreprises de plus de 1 000 salariés) normalement assujetties déclarent une note sur 100 points.
Seul un quart des salariés du secteur privé sont concernés par le calcul de l’indicateur d’écart salarial de l’Index.

2. La mise en place de l’Index n’a pas d’effet détectable sur les inégalités femmes-hommes dans les entreprises concernées

Les entreprises de moins de 50 salariés (non assujetties à l’Index) et celles de plus de 50 salariés (assujetties à l’Index) ont des trajectoires remarquablement parallèles en termes d’inégalités femmes-hommes entre 2010 et 2020. On n’observe pas de changement de tendance pour les entreprises assujetties après la mise en place de l’Index en 2018.

3. L’Index tend à invisibiliser les inégalités réelles entre femmes et hommes

Les bons résultats obtenus par les entreprises pour les écarts de rémunération sont liés à deux choix méthodologiques discutables faits pour le calcul de l’indicateur d’écart de salaire de l’Index :

  • l’application d’un seuil de tolérance (tous les écarts inférieurs à 5 % sont ramenés à 0)
  • l’utilisation des hommes comme catégorie de référence pour normaliser les écarts (les écarts dans chaque groupe sont divisés par le salaire moyen des hommes, ce qui les réduit quand les femmes sont moins bien payées que les hommes mais les augmentent dans le cas inverse).

4. Les entreprises qui déclarent leur Index ne sont pas plus vertueuses – au sens de leur performance en matière d’égalité professionnelle – que celles qui ne déclarent pas

Les données administratives utilisées dans l’étude permettent de mesurer les inégalités femmes-hommes à la fois pour les entreprises qui déclarent un Index et celles qui ne le déclarent pas : les entreprises qui ne déclarent pas leur Index ou déclarent ne pas pouvoir le calculer ne sont pas plus inégalitaires que les autres. Elles reportent en revanche des notes à l’indicateur d’écart salarial supérieures à celles recalculées à partir des données administratives.

On observe que pour l’indicateur simple et transparent que constitue la part des femmes parmi les dix plus hautes rémunérations, les déclarations des entreprises concordent avec leurs résultats reconstruits alors que cela n’est plus vrai pour l’indicateur complexe et ajustable d’écart salarial. Cela suggère que l’utilisation d’indicateurs complexes et peu transparents peut permettre aux entreprises d’invisibiliser leurs inégalités réelles.

Publications :

Les premiers résultats de ce projet ont été présentés le 6 mars 2023, en conférence de presse.

> Voir la présentation

> Lire la synthèse du rapport

Le rapport, dans sa version intégrale et consolidée, est public depuis le 7 avril 2023.

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Données et méthodologie :

  • données administratives issues de la Base Tous Salariés incluant les rémunérations perçues et les heures travaillées chaque année par l’ensemble des salariés
  • données administratives issues de la base « Indexegapro », qui contient les valeurs déclarées (note globale et composantes) par les entreprises et unités économiques et sociales depuis 2018, dans le cadre de l’obligation de déclaration et de publication de l’Index

La Base Tous Salariés permet de mesurer les inégalités femmes-hommes dans chaque entreprise chaque année et de comparer l’évolution au cours du temps de ces inégalités pour les entreprises concernées et non concernées par la mise en place de l’Index de l’égalité professionnelle. En l’associant à la base “Indexegapro”, il est ensuite possible (i) d’examiner de façon détaillée les proportions d’entreprises et de salariés théoriquement et effectivement concernés par la mise en place de l’Index, (ii) de comparer l’ampleur des inégalités femmes hommes dans les entreprises qui déclarent un Index calculable et celles qui n’en déclarent pas ou déclarent que celui-ci ne peut être calculé, et de (iii) comparer les notes déclarées par les entreprises à l’Index avec les inégalités femmes-hommes telles que reconstruites à partir de la Base Tous Salariés.

Equipe de recherche :

Ce projet a été mené sous la responsabilité scientifique de Thomas Breda (professeur associé à l’École d’économie de Paris et chargé de recherche au CNRS, responsable du pôle travail et emploi à l’IPP) et Marion Leturcq (chargée de recherche à l’Ined- Institut National d’Études Démographiques et chercheuse affiliée à l’IPP).

L’équipe était également composée de :

  • Paul Dutronc-Postel : économiste senior à l’IPP
  • Joyce Sultan Parraud : économiste senior à l’IPP
  • Maxime Tô : économiste senior à l’IPP
  • avec le précieux concours de Juliette Ducoulombier lors de son passage à l’IPP